Derrière ce label des couvreurs et des plombiers s’engagent. Ne me racontez pas d’histoires, tout comme moi vous n’auriez pas résisté à la tentation de jeter un œil à travers cette vitrine. Car enfin, ce n’est quand même pas tous les jours qu’on peut assister à l’union sacrée de couvreurs et de plombiers. En tout cas pas dans mon quartier où l’on ne badine pas avec les sexes - hélas, trois fois hélas, peut-être même suis-je le seul à badiner avec le mien, il faudra que je me renseigne à ce sujet. Pour preuve, cette vitrine passée au blanc d’Espagne, avec un soin et un sens artistique peu ordinaires. Dans un souci d’intimité peut-être. (Ou bien la honte? Les parents sont farouchement opposés à ces unions : Où va la plomberie si… Où va la couverture si… ?)
Donc je jette un œil, prêt au besoin à proposer mes services de photographe amateur. Et puis j’aime les mariages, on y croise des enfants ridiculement vêtus, on y fait des rencontres, on boit un coup ou deux ou trois, et parfois on rigole bien.
Je jette un œil et tends l’oreille mais pas dans le même temps car j’ai horreur de faire deux choses à la fois, d’ailleurs je ne sais pas. Vaste silence. Etonnant. L’ambiance ne semble pas à la fête, c’est peu de le dire. Ou alors, possible aussi, elle est au plus profond recueillement. Un instant, j’essaie de m’imaginer les six ou huit futurs mariés plongés dans de tels abîmes spirituels mais sans y parvenir vraiment.
Peut-être suis-je en avance ? Ou très en retard ?
L’idéal serait de soulever un coin de ce label mais je n’ose pas. (Une fois j’ai failli me faire avoir comme ça à l’entrée d’une mairie où l’on m’a supplié de devenir témoin. Faute d’une rémunération convenable, j’ai sauté sur le prétexte pour refuser mais il s’en est fallu de peu que ma timidité l’emporte.)
Je préfère donc circuler.
Sur le chemin du retour, comme je raffole des histoires d’amour, surtout celles des autres, je m’interroge sur la probabilité d’une rencontre entre un couvreur et un plombier. Et là stupeur : on se croise dans l’escalier, on casse la croûte ensemble au bistro voisin, la conversation s’engage… Oui, à vrai dire rien de plus simple ni de plus naturel.
Se passera-t-il un jour sans que je m’aperçoive que j’ai raté ma vie ? Un jour, un seul.