Un peu plus d'une plombe que je suis là à me broyer les genoux sur ce prie-Dieu. Pour le moment j’arrive à me retenir de rire mais ça ne durera pas. Le peintre que je sens s’agiter tout près derrière sa toile, mes collègues qui toutes les fois qu’ils passent par là me font des concours de grimaces, ne m’aident en rien : je vais hurler de rire ce sera la première fois de ma vie je crois. Un formidable éclat. Un grand, long, large, et interminable rire qui va me faire du bien, tant de bien je sais, je veux qu’on l’entende jusqu’en Avignon et au-delà.
C’est sûr, je regretterai le verger. On s’y trouve à l’ombre au moins et il regorge de fruits en cette saison, il faut se battre avec les oiseaux pour les cueillir.
Tous ces chemins qui m’attendent maintenant, dès que j'aurai sauté le mur, je les prendrai tous, un à un, l’un après l’autre. Peu importe où ils mènent tant qu’ils passent les collines. Je m’y retrouverai allez.
Mais j’oublie de vous dire : j’ai perdu la foi. C’était il y a une petite demi-heure, je me suis vu dans cette posture, je me suis apparu et je n’y ai pas cru. Je l’ai perdue ainsi ma foi, tout bonnement, sans chercher à la perdre vraiment, d’un trait d’un seul, un peu comme on vide son verre de vin frais.