Bien sûr c’est au moment où je m’apprête à abandonner que le petit salopiot manque de partir à la baille.
Une demi-heure que je suis à l’affût tel le fauve, c'est à dire confortablement assis à l'écart sur un banc, le 70/200 vissé sur l’appareil, chargeur engagé, le tout bien calé sur le monopode, cadrage parfait (ce qui n’est pas le cas ici où l’on voit que je me suis levé pour lever le camp).
Une demi-heure qu’il joue à attraper Dieu sait quoi, l’eau peut-être, entre ses doigts ce crétin, un poète dans son genre, une demi-heure que les parents assis à sa gauche, hors cadre donc, s’interrompent toutes les dix secondes pour hurler "Attention Renéééééééé ! tu vas tombéééééééééééé(r) !!!"
Mais René ne tombe pas.
Pourtant sa jambe droite (photo) se soulève fréquemment vers le ciel, manquant de déplacer le centre de gravité là où précisément je l’attends, je l'espère, l’appelle de mes vœux les plus sincères, le souhaite de toutes mes forces. J’aurais bien volontiers prêté la main au sort qui s’acharne mais c’était à choisir : une franche rigolade immédiate autant qu’éphémère ou la perspective d’un superbe diaporama (4 images/seconde), avec plongeon du gamin tête la première, semi-noyade, arrivée des parents, volée de bois vert, taloches, hurlements du crétin, soulevé de terre, secoué, violenté, achevé sur place voire. YouTube me voilà, envoyez la monnaie.
Au lieu de ça, rien. Juste cette photo, qui permet rêver un peu nonobstant.