« C’est ici que nous apparaît la supériorité évidente de la chenille sur la roue. »
(Georges-Marie HAARDT & Louis AUDOUIN-DUBREUIL.
La Première Traversée du Sahara en automobile.
Paris, Librairie Plon. 1924.)
Alors que nous étions gaillardement partis pour découvrir les sources du Nil, mon ami Luc Lamy (dit aussi l’Africain, tant il l’est africain, bien plus en tout cas que sa véritable nationalité ne le laisserait supposer) et moi-même, nous sommes soudain rendus compte, alors que nous étions déjà à mi-chemin et que les bistros se faisaient de plus en plus rares voire inexistants, que les dites sources étaient somme toute déjà connues, grosso modo, que par ailleurs elles ne devaient délivrer qu’une eau douce, plate qui plus est, tout juste bonne à noyer le pastis (ce qui au demeurant n’est pas rien mais ne justifiait pas que l’on usât pour cela nos chenilles et notre belle jeunesse, sans parler des inconvénients liés à la présence d’indigènes qui avaient le front ces drôles de se croire chez eux).
Bref, tout ceci nous a donné à réfléchir. Pas longtemps : comme un seul homme nous avons fait demi tour, roulant jour et nuit jusqu’à Mostaganem où nous avons bu l’anisette jusqu’à plus soif.
Suite à quoi, ayant dédommagé grassement notre chauffeur, Marcel, un ancien des bataillons d’Afrique, un as du volant, ce que nous avons pu tourner en rond lors de ce périple c’est à peine croyable, fine gâchette de surcroît, combien de fois nous a-t-il tiré d’embarras comme cette nuit où nous avions aimablement invité sous notre tente quelques femelles du coin en vu de notre joie, nous décidâmes de retraverser la méditerranée pour nous attaquer cette fois aux sources du Montrachet. Oui, nous ne manquions pas d’audace à cette époque.